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Contexte

introduction au sujet

D’ici 2031, tous les pays européens devront avoir déployé une carte d’identité électronique, permettant le développement d’un écosystème de services. Avec le développement des services numériques, la nécessité d’associer une personne physique à son double virtuel est devenu un enjeu central, repositionnant ainsi le débat sur l’identité numérique. La crise a également accéléré la numéricité de nos usages (télétravail généralisé, signatures électroniques de contrats induites par le distanciel), démontrant qu’il est indispensable de penser une administration dématérialisée, de confiance et inclusive / mais également pour les structures privées (entreprises) de proposer des solutions et services incluant cette question de l’identité numérique, en questionnant ses enjeux.

Enfin, le Conseil national du numérique a livré un rapport en juin 2019 intitulé « l’identité numérique, clé de voûte de la citoyenneté » qui a permis de dessiner plusieurs pistes d’action, que ce soit pour les citoyens, les entreprises, mais également les collectivités. Un programme interministériel est également en place depuis deux ans, avec notamment le test d’Alicem, qui est la première solution d’identité numérique régalienne sécurisée.

Face à ces différentes observations, TUBÀ, en tant qu’acteur de la médiation numérique a décidé de mener des événements auprès du public professionnel – en partenariat avec SNCF (direction digitale) – afin d’ouvrir la discussion et le débat autour des enjeux de l’identité numérique. L’open café et le meet-up ont permis de croiser les regards d’expert·es de la thématique, autour de cette grande question : à qui confier mon identité numérique ?

EXPERT-ES INTERVENANT-ES

  • Charles-Pierre Astolfi (CNNum – Secrétaire général) : Rapport du CNNum « Identités Numériques, clés de voûte de la citoyenneté numérique » . Accessibilité et inclusion.
  • Caroline Beauregard et Narjes Mihri (SNCF – Direction digitale) : Impact des technologies sur la mobilité. Sujet à fort potentiel pour le groupe SNCF. Identification de cas d’usages, écosystème autour de ce sujet.
  • Isabelle Landreau (Think Tank Génération Libre – Avocate déléguée à la protection des données) : Patrimonialisation des données à caractère personnel. Co-rédaction du rapport « Mes data sont à moi ».
  • Valérie Peneau (État – Direction du programme interministériel France Identité Numérique) : Promotion d’un moyen d’identification électronique sécurisé.

synthèse des échanges

une identité, des identités

Le terme « identité numérique » regroupe différentes acceptations.

Une identité définie par son utilisateur

D’une part, sous sa forme la plus littérale, une identité numérique correspond à la création d’un compte utilisateur sur une plateforme, que ce soit pour un service public (payer ses impôts) ou non (réseau social). L’utilisation de ce service numérique requiert la création d’une identité, liée à son identité réelle ou non (création d’un « faux » profil). Certains services numériques (France Connect ou Google Connect) permettent de se connecter à différents services via une identité commune. Ce sont des fournisseurs d’identité qui occupent un rôle central dans la vie de l’utilisateur, en « simplifiant » leur usage numérique. Toutefois, il est indispensable de comprendre quel pouvoir est donné à chaque fournisseur afin que l’utilisateur garde le contrôle sur son identité en ligne.

Un utilisateur défini par son identité

D’autre part, cette dernière peut correspondre à une déclinaison numérique de l’identité civile qui est prouvée par le titre d’identité physique (et les différents attributs de ce dernier : le nom, le prénom, la date de naissance etc.). Dans ce cas, il est question de se demander comment est-il possible de donner le même degré de confiance aux utilisateurs d’un service en usage numérique qu’en physique ?
Certains usages comme le changement de RIB nécessitent de « prouver l’identité numérique », il faut alors veiller à étudier les éléments indispensables à donner au fournisseur de services, et ceux qui ne le sont pas.

un sujet qui nous concerne tous

POUR LES ENTREPRISES, Un socle technologique pour la construction de nouveaux cas d’usages …

Pour les entreprises, l’identité numérique présente la possibilité d’identifier et définir différents cas d’usages. Pour SNCF (direction digitale), trois grands enjeux ont été soulevés par cette dernière :

  1. La sécurité des transactions : le numérique conduit à échanger et à faire des transactions avec des personnes qu’on ne connaît pas, qu’on ne voit pas, il est donc nécessaire d’instaurer la confiance aussi bien du côté de l’entreprise que du client.
  2. La protection des données clients et la fluidification du parcours client : dans une économie numérique dématérialisée, il y a des systèmes d’information qui laissent sortir de plus en plus de données, il y a besoin d’un cadre pour sécuriser ces échanges de données et pour construire des services un peu plus adaptés à chacun, plus personnalisés. Des systèmes de gestion d’identités robustes – notamment dans la mobilité – doivent être créés : le MaaS (Mobility as a Service) par exemple, consiste pour le client de pouvoir se déplacer facilement d’un point A à un point B en enchaînant parfois plusieurs modes de transport comme le métro ou le vélo.
  3. La souveraineté numérique dans le sens gestion de la relation client : les données clients – notamment les données de déplacement – sont clés pour construire des services qui sont plus adaptés à ces derniers. Il est par exemple indispensable de savoir combien de personnes font le trajet Paris-Lyon un lundi matin pour faire évoluer l’offre en fonction de la demande.
La technologie est au service de l’humain et ce n’est pas l’humain qui est au service des algorithmes
Isabelle Landreau (Think Tank Génération Libre)

POUR LES citoyens, un moyen de reprendre le contrôle sur ses données …

Pour les citoyens, l’identité numérique regroupe différents enjeux :

  1. La protection de sa vie privée.
  2. Le contrôle de ses données : fait par le citoyen lui même, par les outils que nous avons. Est-ce que je suis d’accord pour que mes données soient cédées au service numérique utilisé, dans quelles conditions ?
  3. La patrimonialisation de ses données : quelle place dans la chaîne de valeur de la donnée pour le citoyen et pour que ce dernier reprenne le contrôle ?
  4. La sécurisation des transactions.
  5. La simplicité et fluidité du parcours : la vie digitalisée induit une multiplicité de comptes et d’identifiants, ce qui complique parfois l’usage numérique.
  6. La souveraineté numérique : le premier fournisseur d’identité aujourd’hui, est Facebook Connect y compris pour des usages publics.
Redonner une maîtrise et une sécurité pour l’usager, pour des usages qui le méritent et qui l’exigent, et uniquement pour cela, avec une possibilité de choix.
Valérie Peneau (Progamme interministériel « Identité Numérique »)

confiance et identité numérique, quel équilibre ?

Il faut offrir aux utilisateurs un parcours qui soit à la fois extrêmement sécurisé et donc de confiance, mais qui, pour autant soit extrêmement accessible au plus grand nombre.

  1. La transparence : l’usager doit savoir à quoi servent ses données, ce qu’il a envie de transmettre ou non. Il faut qu’il soit convaincu de l’utilité directe du service utilisé.
  2. L’effort de pédagogie … : il est important d’accompagner l’usager en lui expliquant que l’identité numérique est une brique d’authentification qui lui sert pour accéder à plein d’autres services et qu’il faut donc qu’elle soit sécurisée : il faut définir avec lui des usages.Les procédures qui ne sont pas encore dématérialisées de bout en bout (procurations de vote) pourraient l’être notamment grâce à la mise en place d’une identité numérique sécurisée.
  3. … et de sensibilisation : de nombreux usages dématérialisés demandent de fournir des scans de titres identité. Cette information reste définitivement en stock de façon extrêmement fréquente. Il est indispensable de sensibiliser les utilsateurs à la gestion et la protection de leurs données personnelles.

Générer la confiance ?

Valérie Peneau

Il faut associer à l’outil le plus simple et le plus sécurisé des usages et des utilités qui parle immédiatement à l’usager parce que ça simplifie sa vie, parce que ça l’empêche de se déplacer et parce qu’il a la garantie que ses informations ne soient pas confiées à n’importe quel acteur.

ENTREPRISES … comment générer la confiance auprès des utilisateurs ?

Les utilisateurs demandent toujours moins de travail (facilité du parcours) mais ils exigent également de la transparence et de la sécurité. Cela induit donc la production de systèmes plus complexes, et l’apport d’évolutions technologiques pouvant apporter certaines pistes de solution : la biométrie, la blockchain.

Exemple de cas d’usage « La preuve de divulgation nulle de connaissance » : parfois on communique toute notre carte d’identité alors que notre interlocuteur veut juste s’assurer qu’on est majeur, cela peut être résolu notamment par la blockchain.

La confiance derrière une identité numérique passera possiblement par l’utilisation de technologies plutôt au modèle décentralisé : un utilisateur au centre qui peut choisir à qui partager ses données ou à qui il souhaite révoquer l’accès de ses données.

ÉTAT … comment générer la confiance auprès des utilisateurs ?

Pour qu’il y ait confiance il faut en faire une multitude d’éléments pris en compte :

  • Une transparence sur les technologies utilisées
  • Une pédagogie (confusion, incompréhension sur le sujet)
  • Une capacité d’évolution et d’interaction avec les utilisateurs sur l’application (de la co-construction nait la confiance dans l’utilisation)
  • Un cadre juridique respectueux d’un environnement normatif très complet
  • Pas d’offre exclusive de la part de l’Etat : possibilité d’utiliser d’autres moyens d’identification fournis par d’autres acteurs.

Exemple d’ALICEM : l’utilisation de la biométrie par un système de reconnaissance faciale, ne permet pas de considérer que le consentement soit pleinement libre. Il faut donc proposer une alternative.

Quels piliers ?

Isabelle Landreau

Il existe 2 piliers fondamentaux à la confiance. D’une part technique (avoir un système décentralisé, coopération européenne, interopérabilité) et d’autre part juridique (consentement, connaissance de la finalité de l’exploitation de ses données).

Comment s’emparer du sujet ?

  • S’informer : Il est nécessaire de sensibiliser les citoyens au sujet de l’identité numérique (sa gouvernance, sa gestion, la confiance accordée aux différents acteurs etc.) Il faut informer et ouvrir le dialogue, pour que chacun se munisse des clés de compréhension et soit en capacité d’agir et d’avoir sa propre opinion.
  • Se questionner : La sensibilisation sur l’usage de l’exploitation de ces données est également primordiale. Les citoyens doivent sortir de ce qu’on appelle le paradoxe de la vie privée : ils sont conscients de vouloir être protégés, mais n’ont pas forcément les clés pour maîtriser leurs données. Il faut que chacun puisse se dire : quel est mon seuil de confidentialité ? Quel est mon seuil de protection ? Et qu’est-ce que je veux faire de ces dernières ?
  • Participer : Des consultation nationales (la CNIL, le CNNum) offrent la possibilité de donner son avis sur de futurs projets et services numériques. Il faut donner la possibilité au citoyen de prendre conscience que sa vie numérique a une vraie valeur et qu’il est important qu’il puisse partager son opinion pour que celle-ci soit prise en compte.

Pour aller + loin

visionnez le meet-up

découvrez le cycle global

Identité Numérique

Une série d’événements pour s’informer et débattre sur les enjeux de l’identité numérique

Atelier : Consultation citoyenne Identité Numérique

Étudier la perception du grand public sur l’identité numérique

ressources bibliographiques

(RAPPORT) Identités Numériques, clés de voûte de la citoyenneté numérique – CNNum (06/2020)

(RAPPORT) Mes datas sont à moi – Génération Libre (2018)

(RAPPORT) Aux datas citoyens ! – Génération Libre (2019)

(ARTICLE) RGPD : Les défis éthiques de l’identité numérique – Armen Khatchatourov et Pierre-Antoine Chardel (2019) – La Gazette

 

 

(ARTICLE) La médiation documentaire sur les réseaux socionumériques comme vecteur de l’e-réputation ? – Camille Alloing (2013) – OpenEdition Journals

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